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Vafan Cuolo needs you !
20 juillet 2007

Victor Ploumelec contemplait avec envie la

Victor Ploumelec contemplait avec envie la galette saucisse et se dit qu'en vérité, c'était une bien belle galette saucisse. Il en captait presque l'exquis fumet à travers la vitrine. La saucisse luisait langoureusement, la galette exhalait le blé noir détrempé de la rosée sucrée d'un doux matin de printemps de la vallée de la Ruhr. Tremblant de tout son alcoolisme, il compta et recompta le maigre contenu de sa bourse. Son visage buriné de souqueur d'artemuse se crispa lorsqu'il prit conscience de la douloureuse réalité. Il ne pourrait satisfaire à sa ration quotidienne de chouchen et céder à l'appel de la galette saucisse. La sirène et les cris des mouettes accompagnant le retour au port d'un petit chalutier hors d'âge, attira son attention. Le capitaine adossé au bastingage rouillé de l'embarcation était vieux. Le jeune marin qui tenait la barre semblait frêle et souffreteux. A n'en point douter, ils allaient avoir besoin de mains pour le déchargement de la pêche et allaient se monter généreux envers le salvateur manutentionnaire. Victor entrevit à cet instant toute la grâce et la miséricorde divine. Ses yeux torves s'illuminèrent, il adressa un baiser à la galette saucisse et mu par sa destinée culinaire il entreprit, claudiquant, de traverser la petite route pavée pour aller à la rencontre du navire. Le bus fit une embardée pour l'éviter l'ivrogne. Le véhicule se coucha sur le flanc dans un vacarme assourdissant et les hurlements des passagers. Une gerbe d'étincelle déchira la brume pendant ce qui sembla durer une éternité, figeant la scène dans toute sa splendeur macabre. Le car fou heurta la capitainerie et rebondit inéluctablement vers l'océan, comme hypnotisé par les chants d'antiques sirènes. L'océan avala lentement l'autocar dans des borborygmes obscènes. Chose étrange, le remou provoqué par la chute du bus fut renforcé par celui du chalutier -manoeuvrant inutilement pour ne pas l'éperonner- dans un concert de longueur d'onde parfaitement synchronisée. Alors que le navire, éventré, sombrait corps et âmes, l'onde marine provoquée par les remous se propageait rapidement vers le large, et favorisée par la marée n'allait pas tarder à entrer en résonnance avec la houle. Ainsi dans quelques jours, elle atteindrait la côte est des états unis, après avoir forci dans les tempêtes de l'atlantique. Espiéglerie des dieux ou caprice de la nature, le chaos réunirait toutes les conditions pour qu'à l'approche des hauts fond côtiers, l'onde marine se mue en un gigantesque raz de marée, un tsunami de fin du monde qui allait rayer de la carte les Etats Unis. S'ensuivrait ensuite un chaos mondial projetant l'humanité dans les ténèbres, les guerres et les épidémies. En moins d'une décade, l'espèce humaine aura complètement disparu de la surface de la terre.

Victor jetta un regard dubitatif à la galette saucisse. Elle était la, toujours aussi attirante, pleine de promesses inavouables. Il haussa les épaules et se dirigea vers le bar du village, sans un regard pour l'apocalypse qu'il avait provoqué. Il ne vit pas le papillon qui se posa sur son épaule. Il ne vit pas non plus la voiture qui arrivait en sens inverse.

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